Bien des choses qui ont été écrites sur les sociétés africaines, sont pour le moins inexactes, voir même tendancieuses, y compris bien sûr une bonne partie de ce qui est rassemblé ici...
L'idée qu'on se fait d'autrui est fonction de ce qu'on est soi-même.
Ce qu'on croit connaître...
Chacun depuis son enfance, s'identifie a un certain nombre d'images qui ne varient guère : -L'Afrique des bêtes sauvages, dans une nature luxuriante, vieux rêves d'un paradis perdu des origines de l'homme. -L'Afrique du soleil écrasant, implacable. -L'Afrique des grandes étendues, immenses terres livrées à elles-mêmes. -L'Afrique des eaux, des lacs et des fleuves indomptés...
Ces stéréotypes renforcés par une lecture para-scolaire de Tintin au Congo, d'Akim, de Zembla ou de Tarzan... par un cinéma spectable de type "Monde sauvage", viennent converger sous couvert d'un flot appétit de connaissance et d'un regard d'allure scientifique, avec un projet d'approche contemporain de la colonisation.
C'est donc l'homme africain "le bon sauvage", proche de la matérialité naturelle, innocent parce qu'il a tout à apprendre ; naïf parce qu'il ne sait pas apprendre ; drôle et amusant parce qu'il vous singe maladroitement...
C'est aussi "le mauvais sauvage", irréductible sorcier, jeteur de sorts, coupeur de têtes d'une espèce à jamais perdue, le cannibale des grandes marmites où mijotèrent les dignes et vaillants explorateurs...
Vous n'avez pas encore exorcisé ces postulats, peut-être projection de vos propres "démons."
Derrière l'Africain d'aujourd'hui au village ou à la ville, se profile à vos yeux, une ombre de "primitivité" qui vous révulse ou vous attire. Ceci est d'autant plus frappant que vos discours sur l'homme africain, portent beaucoup plus sur ses comportements que sur une tentative d'approche de sa pensée.
Etes-vous ethnocentristes ? Votre humanité universelle a secrété des valeurs assimilationnistes... L'étalon, c'est l'Occident. La véritable nature humaine, son essence même, est axée sur l'idée de progrès, d'évolution, du passage d'un stade à un autre... Cette démarche occidentalo-centriste, contrôle le monde et se veut plongée dans une histoire cumulative qui dans son dynamisme parfois aveugle, rejette l'autre, c'est à dire la minorité différente. Heureusement qu'il existe les sciences de l'Homme : L'anthropologie, l'ethnologie, etc.
Certes les temps ont changé, depuis que Sir Samuel Baker revenant du Haut Nil déclarait aux vénérables membres de la société ethnographique anglaise en 1866 :
"Ces races sans exception, ne possèdent aucune croyance en un être suprême, ni aucune forme de culte ou d’idolâtrie. L'obscurité de leur esprit n'est pas même éclairée par un rayon de superstition : ils ont l'esprit aussi stagnant que les marais qui fondent leur monde étriqué".
Un discours dont se seraient certainement référés ceux qui croient encore aujourd'hui que l'homme Africain n'est pas encore rentré dans l'histoire. Cependant, la connaissance accumulée sur les sociétés africaines, n'est pas neutre : Celle-ci se développe avec la domination de l'Europe sur l'Afrique, régions par régions et par étapes économiques.
Les sociétés nouvellement "découvertes" vont se trouver qualifiées d'une foule d'adjectifs aussi mystificateurs les uns que les autres, auxquels on cherche par la suite à donner un statut scientifique. Ces sociétés sont : Primitives, archaïques, arriérées, traditionnelles, sans écritures, sans machinisme...
Ces termes imprécis désignent le volet symétrique et inverse du modernisme occidental. Par ailleurs ils véhiculent explicitement ou non des jugements de valeur et permettent d'amalgamer des sociétés africaines dissemblables sous certains rapports déterminants : parenté, politique, religion, économie. Les observations portées sur le monde africain vont le découper en catégories par référence à la discipline occidentale et lui donner un caractère de "microcosme expressif." C'est ainsi, fait tout à fait exceptionnel dans l'histoire de l'humanité, que l'on va séparer l'économie de la famille, le politique du religieux, l'individuel du collectif ou du communautaire, etc.
De là, peut-être l'utilisation publique d'un vocabulaire regroupant des significations rassurantes pour le "civilisé" mais combien imprécises ou dénaturées : fétichisme, totem, animisme, tabou, vie autarcique, magie, sorcellerie, tribalisme, etc.
En attendant, l'Afrique a ses mystères qui regardent avant tout, les Africains. Cette page ne me semble pas non plus indiquée, pour évoquer ou parler de ce qui relève de l'initiation.